Alain Galet, multimedia artist.

Digital and traditional art creations

Femme assise.

Une femme opulente, cheveux épais et sombres, assise. Le buste est penché en arrière et appuyé sur le coude gauche. La composition, un grand format, est traitée en aplats de couleurs éclatantes, couleurs primaires et secondaires bornées par un cerne sombre. La toile enduite, base matérielle de cette peinture, a été agrandie en plusieurs points par d’autres morceaux. Cela donne à l’œuvre un aspect rustique et primitif par la présence visible des coutures. Il se dégage de cette œuvre une impression de force paisible, juste un peu dérangée par la chatoyance des couleurs. (*1) Le peintre, jeune homme longiligne et brun-noir, possède un humour très pince sans rire. Cette distance, très présente dans son discours et dans son allure vestimentaire ne se retrouve pas dans ses dessins ou ses peintures. Une sensibilité, à fleur de peau et sur le fil du rasoir, se cache dans ce corps maigre et long qui cependant s’expose aux brutalités du rugby comme pour s’en couper. Monté du sud-ouest, Philippe a suivi des cours de peinture et dessin dans une ville écrasée par le soleil et anesthésiée par la digestion du cassoulet. Il possède un charme magnétique, yeux noirs superbement dessinés sur un visage d’empereur romain encadré d’une chevelure ou d’une tignasse, selon l’humeur et le soin apporté, noire comme le cerne de ses tableaux. Son allure de Don Quichotte, efflanquée et sa grande taille créent toujours un contraste saisissant avec son dessin qui ne s’attache qu’aux formes pleines, rondes et sensuelles. Sa palette de couleurs est elle-même aussi une violente négation de son personnage physique : couleurs orageuses, contrastes violents, éclaboussures de teintes pures, juxtapositions de valeurs sauvages et brutes. Par sa peinture et par sa présence, toujours discrète au fond de l’atelier, Philippe s’est attiré l’adhésion immédiate de ses congénères qui attendent ses traits d’humour comme des enfants quémandant des sucreries. Il peint et dessine en légèreté, caresse la toile et le papier d’un bras maigre et souple, l’instinct et les sens activés et mobiles. Son oeuvre déjà produite comporte des xylogravures polychromes ou le sillon creusé dans la planche de bois trace, curieusement, des chevelures rythmées comme des branches d’arbres. Les peintures, qu’il fit dans sa chambre d’étudiant du Sud-ouest, présentent d’étonnantes scènes d’intérieur vues en plongée de celle-ci.

(*1) La gestation de cette œuvre fut immédiate, spontanée, juste rythmée par la présence conjointe du modèle et du jeune artiste. Chaque mercredi soir pendant 4 semaines, arrivait Sandra au sourire éclatant. Elle disparaissait pour se dévêtir puis montait sur la sellette enroulée dans un paréo aux motifs cachemire. Elle se posait, cherchait sa place. Enfin elle posait. Les lumières s’allumaient. 45 minutes de cette présence rose, une espèce de Dalila à chevelure mousseuse qui irradiait dans le halo des projecteurs. Puis le modèle quittait la sellette, les lumières de ce proscénium improvisé s’éteignaient, les élèves rangeaient et repliaient leurs matériels. Philippe, souvent le dernier, quittait l’atelier comme à regret, happé par la petite porte qu’il franchissait presque en courbant la tête. Il fallait attendre 7 jours, en dehors des vacances scolaires, pour que s’établisse de nouveau cette connexion électrique entre le modèle et lui. Cependant, il continua, plongé dans sa grande toile et dans son bain de couleurs encore deux semaines, avant que ses yeux noirs ne s ‘éclairent plus d’aucunes étoiles. La toile fut ainsi peinte en 6 séances de 3 heures chacune, ponctuées par 15 minutes de pause ou son humour aspergeait les hauts murs de l’atelier.

Alain Galet (2015)

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La carabine de Fernando.

Petit matin gris et pluvieux. Hôtel genre Ibis. Zone commerciale et industrielle d’une petite ville du centre de la France. Devant l’hôtel, un minibus de location attend, brillant d’humidité. Abritées sous les auvent de l’hôtel et groupées autour du cendrier extérieur sur pied :
Morgane, jeune fille blême et maigre.
Sofiane, rebaptisée ironiquement « Sophie les malheurs » par l’équipe, beurette plantureuse.
Elles fument une cigarette, s’emmitouflant da s de longs manteaux matelassés. Regard gris et morne de lendemain de soirée arrosée.
Morgane, expirant la fumée : Putain, quelle cuite hier soir………
Sofiane : ouais, je ne suis pas méga en forme….
Morgane : tu kiffes le film, toi ? Et le scénar, tu le trouves comment ?
Sofiane, haussant les épaules : Pas terrible cette prod. Hier, pour la scène de la poursuite de Sergio avec l’histoire de la bicyclette. Là, j’ai pas trop compris. Tu sais, ça commence avec le plan dans le bistrot ou Sergio arrive et pousse une gueulante parce qu’il ne retrouve pas son fusil.
Morgane : Ah ouais, j’m’en souviens. J’avais déjà fumé un gros stick, totalement pété la nana. Elle rigole toute seule à cette évocation.
Sofiane : t’as de la chance parce que moi question bédeau, j’dois rester calme. Sans ça j’te les transforme en travelos, les stars de mes fesses. Donc après c’est la scène ou Sergio sort en courant du troquet pour aller piquer le vélo de Marc. D’ailleurs il est pas gâté, Marc. Son personnage est pas terrible : un gros con, macho, chasse et pêche et tout le kit complet………Après, pour la course poursuite, ils ont dû la refaire 7 ou 8 fois parce que les 2 figurants que l’on a casté n’sont pas franchement des lumières.
Morgane : Normal, quand on vient du Mesnil-la-Mine.
Les deux filles éclatent de rire puis toussent.
Sofiane : Ce film est totalement…entre nous, tu l’dis pas, un peu con. En plus maquiller Sergio qui n’arrête pas de se frotter à toi et de te peloter, c’est pas de la balle….
Morgane, avec un ton gouailleur : Ben moi, je l’habille et je le déshabille…en fin façon de parler parce que moi je suis plutôt en déshabillage continu. Je sais pas ce qu’y-z-ont les acteurs mais sur les tournages soit ils picolent ou ils fument, soit ils draguent comme des malades. Enfin, tu l’as vu en slip le Sergio, notre star. Pas excitant le mec…….
Sofiane : Moi, je suis sur le film grâce à la scénar, Lucia Abourdin qui est une copine. J’aime bien Léa mais tous ses films sont des histoires de gros ploucs qui s’enmerdent dans la France profonde de merde. Une vraie affiche pour Marine. En tout cas c’est pas du Josiane Balasko ou du Danielle Thompson.
Sofiane : Comme dit Mathieu l’électro, c’est du Bourdin, rapport aux films de série B, plutôt que du Abourdin !!
Morgane : Enfin la bouffe est correcte, l’équipe est sympa et le réal pas trop chiant. Le seul truc, c’est qu’il se prend trop la tête avec Juliette, son ex, surtout pour les scènes ou Sergio la baise dans une grange.
Sofiane : Avant hier, j’ai dû retoucher 2 fois car elle brille trop, la bardot de prisunic !
Morgane : Tu as compris, toi, l’histoire avec le fusil…moi que dalle…Enfin c’est vrai que j’ai pas fait ni la Femis ni Louis Lumière. Vivement que je travaille sur la prod de « Joséphine Ange Gardien ». J’habille Mimi… d’ailleurs on l’habille d’un rien cette nana, hein ? …les deux rigolent. Elle est assez sympa sauf quand son mari déboule ou téléphone et lui demande du fric….
Sofiane : Quand tu es naine, tu payes et tu nous casses pas les bonbons…
Morgane se retourne alors vers Sofiane : Eh ben, la journée commence bien, en esquissant un large sourire…On va s’éclater…c’est le méga orgasme ce matin.
Sofiane : ouais, t’as raison…enfin on s’amuse quand même bien, et puis c’est bientôt fini !
Morgane : tu vas à Angers, toi ?
Sofiane : c’est quoi cette histoire ?
Morgane : le film sera projeté en ouverture au festival d’Angers…
Sofiane : Y vont se précipiter à Angers avec un titre aussi con, « La carabine de Fernando » ??
Les deux femmes se retournent, la porte de l’hôtel vient de s’ouvrir sur le reste de l’équipe qui monte dans le minibus. Les 2 filles écrasent leurs cigarettes dans le cendrier extérieur et se dirigent vers le véhicule. Sofiane monte alors la première, suivit de Morgane qui, lui pinçant les fesses, tonne « En voiture Fernande ! ». Grand éclat de rire happé par la porte coulissante du minibus qui se referme ne claquant. Le minibus s’éloigne dans le matin, gris, froid. La Pluie a cessé.

Alain Galet (2015)



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Scène de famille.

Diner, intérieur nuit d’une salle à manger éclairée par un lustre au plafond et par la lumière venant de la cuisine en arrière plan au fond.

La bénédiction du repas est achevée. Nancy reste silencieuse et regarde les assiettes vides et inutilisées qu’elle a, par habitude, disposées sur la table par soucis de symétrie. Son fils, Steven, calé dans sa chaise, lui aussi reste immobile et silencieux. Seul le ronronnement du moteur du réfrigérateur et le grésillement d’une ampoule sur le point de claquer meuble cette atmosphère lourde, épaisse qui colle et entoure les meubles, les murs les papiers peints de cette maison bon marché de banlieue américaine. Les deux pièces sont trop propres, trop rangées et le décor de cette scène amplifie l’atmosphère d’ordre névrotique qui opacifie la vue.
Steven respire longuement, lentement, se racle la gorge, avale sa salive puis tente de prononcer quelques mots :
Steven- ……Je vais partir, Mom ; J’ai décidé de partager une maison avec des copains………. près de l’université….
La mère : Tu ne peux me laisser tomber comme ça, comme une vielle chaussette….après tout ce que j’ai fait pour toi……… Elle regarde plus fixement les assiettes vides en face d’elle.
Steven redresse la tête et regarde sa mère avec des yeux pleins d’incompréhension et de dureté. Puis, prononçant pour lui-même dans sa tête : oui, je pars, se convainc-il, pour aller vivre avec mes potes mais surtout pour dormir avec Sally.
La mère veut éviter de montrer son affolement et sa peur de la solitude. Elle range alors les couverts des assiettes inutilisées bien droits de chaque côté de celles-ci , une sorte de signe symbolique de son effroi de la perte de contrôle sur la situation. Elle avait construit sur la timidité et l’introversion de son fils tout un édifice de vérités, seulement valables pour elle, en autiste. Non, il n’est pas gay, juste un peu timide et pas très sportif. Même un peu efféminé, en tout cas trop ambigu pour cette contrée de cowboy entreprenant. Une fois, Steven était rentré avec l’ongle de l’auriculaire peint en rouge vif, un vernis à ongle bon marché. Dès le lendemain, comme Steven l’avait fortuitement découvert, elle avait pris contact avec l’association locale de parents de gays et lesbiennes. Elle saupoudrait également les conversations du petit déjeuner et du diner de références, discrètement appuyées, à des icônes homosexuelles médiatiques et acheta même, parce que les critiques en étaient élogieuses, les Chroniques de San Francisco, qu’elle déposa sur la table de chevet dans la chambre de son fils.
Le soir même, pendant le diner, morne et triste/
Steven : tu as vu, c’est Sally qui m’ a mis du vernis à ongle…………
La mère, totalement décontenancée ; …ah oui ……….c’est Sally ?
Elle qui jouissait déjà des possibilités de se mettre en valeur , sous la lumière cernée par les yeux des autres participants de l’association. Elle devait être celle, qui regard confiant et tête haute, accepte son fils et prépare tendrement la sortie du placard et le difficile aveu de son fils. Elle avait acheté 2 ou 3 livres au titre évocateur comme « Laissez-les parler, l’aveu de l’homosexualité chez les jeunes adolescents » qu’elle rangeait bien soigneusement, dos bien lisible, sous les tableaux de gauche de la salle à manger. Elle s’était créer un fils, sans aucune racine sur le réel, pour qu’il puisse servir ses desseins. Les hommes, objet de son mépris et de sa colère, ne pouvaient s’incarner dans son fils.
La salle à manger, l’automne dernier . Steven, sa mère et un homme, la cinquantaine athlétique et barbue, l’oncle Ted.
Ted : il faut que tu sortes Nancy….il faut tu rencontres des amis… des hommes…..Pense à refaire ta vie……..
Nancy : tous les mecs sont des nuls, des lâches……….ils pensent qu’à s’envoyer en l’air.
Ted la regarde avec une sorte de compassion froide, se lève, les salue et s’en va.
La fin de la soirée, elle rumina sa rancœur envers le sexe masculin puis pensa à son fils . Elle aimait son ambiguïté qui le rapprochait d’elle mais aussi qui l’enchainait à elle. Seule figure féminine destinée à rester vierge de toute trahison avec une Autre. Cependant tout cela s’écroulait, tout cela à cause de cette petite salope de Sally…………..qui……..
Elle aurait du le pousser à faire de la danse.
Elle est sur qu’il ne veut et qu’il ne peut pas s »assumer en ce moment.
Son flirte avec Sally , c’est une fuite, pense-t-elle.
Un soir, à la fin mai, on sonna à la porte de la maison. Un jeune homme à la carrure imposante se découpa dans l’encadrement , éclairé à contre jour par la lumière pâlotte du porche. Bill, le capitaine de l’équipe de football américain de l’université, venait se faire expliquer un exercice de mathématique par Steven. Elle jubilait, pensant découvrir le petit copain de son fils mais elle du déchanté très vite car au diner qui suivit les deux heures passées dans la chambre de Steven, elle découvrit que Bill n’était qu’irréprochablement hétérosexuel. Un sens de l’humour sans surprise et une personnalité passe-muraille sur un sourire blanc brillant.
Steven reprend la parole : Si je pars… pour vivre ma vie quoi… je veux m’éclater avant d ‘avoir à travailler….
Nancy rétorque sèchement : Ta vie…ouais, .. Enfin j’espère………
Steven : laisse-moi vivre, tu veux !
Elle se lève machinalement, désemparée puis se dirige vers la cuisine.
Nancy, sans se retourner : tu veux un café ?
Steven : ouais, si tu ne me le fait pas payer top cher… en soupirant.

Alain Galet (2015)

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Délicieux, c’était délicieux.

Des étirements de chats, dans l’herbe grasse, verte, presque trop verte et humide d’une brume luisante que la cascade d’ à côté déposait sans cesse.
Nous étions arrivés là, après une longue promenade, contents d’avoir enfin atteint un endroit à l’ombre sous les mélèzes et les pins.
Comme dans une chanson, ou plus trivial, une affiche vantant le charme de la région le ciel était presque trop bleu, l’air presque trop frais et pur et les montagnes environnantes trop belles.
Il nous prenait parfois des envies de pleurer d’aise et de bonheur ou d’esquisser une danse, démembrée et folâtre comme dans une danse de Saint Guy.
Juste pour célébrer notre joie d’être là, d’être en vie et de jouir.

Alain Galet (2018)

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Délire.

Je suis à Katmandou, les saveurs de sa cuisine épicée me colle au palais.
Les vapeurs de cannabis me chatouille les narines.
Mon corps nu se protège des sueurs froides dans un vieil édredon de soie, la douceur de cette matière réveille en moi des vague de sensualité, un océan caressant.
Des images se précipitent à moi, je cours dans un décor urbain vide comme dans un tableau de De Chirico, je croise ces amis perdus qui nous laissent un tourment éternel comme si nous voguions sur la vie dans un grand bateau vide.
Cauchemars puis évasions.
Angoisses puis frissons.
Je me tortille dans la soie et dans le moi, trituré par des anges azimutés digne de Füssli.
Une musique, longue mélopée, entrecoupée de miaulements de chats me porte plus loin dans l’ inconscient.
Étranges, grotesques, façon puzzle, les flashes visuels se succèdent, déformés comme le film de la maison du Dr Edwards.
L’apaisement me tombe dessus, violemment, et les cris d’une enfant qui marine dans son urine me tirent de ce rêve fiévreux et étrange.
Pourtant je n’ai pas rêvé mais je l’ai aperçu. Une vision fugace, une silhouette qui passe comme cela dans votre champs de vision et qui vous colle au sol, submergé d’émotion, le cœur battant, la salive rare qui assèche la gorge et le cœur qui bat la chamade.
Non ce n’était pas une personne que j’avais vue mais, comme dans un éblouissement, la somme de celles aimées, réunies dans cette silhouette fragile et humaine qui disparaissait au loin.
J’avais croisé l’amour, la somme de toutes les personnes désirées et aimées.

Alain Galet (2018)

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Saint Barthélémy.

C’est par le souvenir d’une catastrophe que s’ouvrira ce récit.
Et pourtant tout avait bien commencé. Le ciel était bleu, l’eau turquoise, pure et cristalline, transparente ; l’air frais, tiédi par une petite brise soufflant du sud.
Édouard cependant respira profondément.
Il crût être sauvé…
Elle s’éloignait, belle, solaire et il pouvait relâcher ses émotions, se laisser aller.
Tous ses sens avaient été bouleversés.
Je suis un homme…ridicule !
Elle ne l’avait même pas regardé… !
Il tritura ses pieds, le regard plongé dans le sable blanc de cette plage paradisiaque.
« C’est dès la sortie de la boite qu’il a commencé à m’embobiner pour venir ici, à l’anse des Cayes »
Je maudissais Pierre et son entrain, sa spontanéité !
« Cinq, quatre, trois, deux, UN ! » retentit derrière moi. Pierre était en position de départ, comme dans une compétition, pour s’élancer vers l’étendue mouvante bleu aquarelle qui s’étendait au loin dans la brume de chaleur de ce matin.

Alain Galet (2017)

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Biographie :


Sven Norsson, Malmö 1935-Ibiza 2007
Peintre sournoisement mauvais, hargneux, taquin, décorateur de théâtre et de cinéma, criard et mal embouché.

Après une enfance revêche passée à Malmö auprès d’un père petit fonctionnaire qui conduisait une haridelle boiteuse et d’un mère maghrébine très rapidement internée en asile psychiatrique, S. Norsson intègre les Beaux-arts de Malmö qu’il quitte au bout de 2 années dissonantes. Il s’ensuit une période de voyages poissards qui le mènent d’abord dans les hôpitaux puis à l’est du Sahara et en Afrique occidentale en passant par Copenhague, Berlin, Bruxelles, Paris.
Il séjourne à Cannes dans les 1956-59 ou il y rencontre Picasso, Van Dongen, Domergue, et vit de gibier. Cette période fut une période d’eurythmie et d’intense activité artistique acerbe.
Il quitte la Côte d’Azur avec l’harmonie municipale en 1959 pour l’Italie et s’installe à Rome où il travaille pour des haricots.
Il se lie d’amitié avec L. Visconti, avec un horrible canasson et fréquente les cinéastes néoréalistes…c’est la fin des haricots !
Il y créé des décors à poussoirs pour le cinéma indigène d’Afrique du Nord et pour le théâtre, y entreprend toute une série de peintures hargneuses et agressives inspirées par les hygiénistes, pêcheurs de harengs, de l’avant-guerre.
Il réside en Italie jusque dans les années 70, temps où a lieu l’harengaison industrielle, date à laquelle il déménage à Ibiza. Il s’y construira une maison harmonieuse, ouverte à tous, dans les vignes.
Sven Norsson y aborde alors une démarche primordiale et mélodique de son œuvre avec une vison fondée sur la lumière aquatique et sur les effets psychédéliques engendrés par la consommation simultanée de drogues diverses.
Il finira sa vie, entouré par un harem de femmes et de nombreux enfants teigneux, matérialistes, mal élevés et grincheux.
Les œuvres de Sven Norsson sont présentés dans l’atlantique nord et dans de nombreux musées.

Alain Galet ( 2017)

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Ambiance bretonnante :


Crêperie à Montparnasse.
Une salle bondée, une odeur mêlée d’andouillette et de pollution citadine.
Diner après le cinéma.

En face de moi, de l‘autre côté de l’allée de circulation, une table :

  • - Un homme jeune, figure sympathique et ouverte, des yeux humides et mobiles, une coiffure de vieux rat mouillé, vêtu d’un sweatshirt à capuche lie-de-vin. Il se tient en bout de table.


De chaque côté de lui, 2 jeunes filles.

  • - De face, une jolie blonde, magnétique et volubile, visage propre et net, sans maquillage. Seul un piercing au sourcil droit dénote, un anneaux orné d’une micro turquoise. Un sourire très beau et attirant. Bijoux d’argent, mêlés à son habillement aux couleurs de mobilier étudiant : jean et pull bon marché.

  • - De dos, une autre jeune fille, rousse et pale, nuque gracieuse, boucles d’oreilles pendantes, écharpe indienne motif cachemire et pull mousseux, pantalon de velours.


Les 3 se livrent à une discussion animée, ponctuée de sourires, de clin d’œil, de regards lasers vissés dans les yeux de l’interlocuteur ou de l’interlocutrice. De loin, un ring, un combat de charme et de séduction.
La jeune fille blonde quitte la table pour les toilettes semble-t-il. Dès que celle-ci a disparue par l’escalier au sous-sol de la crêperie, le jeune homme, comme l’aiguille aimantée d’une boussole se penche vers son nord, la jeune rousse, avec laquelle il commence un entrelacs de doigts, de baisers sucrés sur bouche à bouche molasses et de confidences de dessous de couette.
Cependant, l’œil masculin, couleur châtaigne reste relativement mais sportivement aux aguets en direction de l’arrivé de l’escalier du sous-sol. Le haut d’une chevelure blonde, aperçue au travers de barreaux en bois sombre faussement rustique breton, interrompt sèchement ces câlineries adolescentes.
Gorgées de cidre., la jeune amazone se lève pour se diriger vers le sous-sol. Surprise, la blonde magnétique prend sa place et remplace l’absente comme si, à son siège était accordé un rôle mystérieux. Regards du bellâtre mal coiffé de nouveau vers la volée d’escalier invisible. Puis, mêlé de coups d’œil scrutateurs et guetteurs de sourires complices post nuit s de sexe et de petits déjeuners en sous-vêtements et visages bouffis.
Le jeune homme alors déguste, dévore sa jeune compagne comme le second plat de son menu spécial Quimper.
Le trou béant de l’escalier révèle les épis de la chevelure rousse de la deuxième jeune fille.
De nouveau à table. Gorgées de cidre, détachements feints et tripotages de boulettes de pains. En haut de l’escalier des toilettes, un visage tourné vers la table, instant de surprise, l’œil bleu à la chevelure rousse jauge et interroge la scène et ce spectacle de la table. Puis nonchalamment s’assied à la place, libre, de son amie. Discussions vives, éclats de rire, regards félins et carnassiers respirant l’envie de la chair, de la peau. Crêpes salées et sucrées dégustées, cidres bouillonnant dans l’estomac, les corps relâchés et ouverts, chaleur de la salle de la crêperie. Brouhaha. Le garçon interrompt la fusion, se lève et se dirige vers l’antre d’aisance. Dès la disparition du moindre cheveux de cette coiffure d’adolescent attardé, membre d’un club de football banlieusard, les 2 filles, comme mu par un ressort commun commencent à se lever pour occuper la place vide. La lutte dure peu, une fraction de seconde et la jeune fille rousse l’occupe, triomphatrice. Regards lancés à la dérobade, aux alentours. Les 2 filles reprennent alors le jeu, le rituel entre elles : baisers de chatons sur bouches humides et sucrées, doigts qui se caressent et se nouent, corps penchés l’un vers l’autre. Les yeux bleus de la rousse cependant scrutent l’apparition de la tignasse ridicule au débouché de l’escalier. Elle apparait.
La table se fige, les corps se redressent et les bouches se referment sur une langue léchant le sucre de l’autre. A l’autre bout de la salle, le garçon, une seconde décontenancé, son œil marron devenu noir, se reprend, se dirige vers la table d’un pas mou cadencé par un pantalon informe moulant ses haches faméliques.
Il s’arrête à la table et debout il regarde les 2 filles : instant de silence, de regards interrogateurs, inquiets. Puis les sourires explosent sur leurs visages. Ils se lèvent, s’habillent et sortent les yeux illuminés de jeunesse, de désir, de joie et d’inquiétude.
Dehors, il pleut. Trottoirs mouillés et odeurs âcres de poussière.

Alain Galet (2018)

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L’amour en location.

Monologue de John, jeune étudiant américain qui se découvre.

« Si le ciel me donne un avis, il faut qu’il parle un peu plus clairement, s’il veut que je l’entende »
Je ne sais plus où j’en suis…
Je suis venu à Paris, une ville ou je rêvais d’habiter, pour poursuivre mes recherches pour ma thèse. Je me suis battu pour obtenir cette bourse prestigieuse qui concrétisait tous mes rêves.
Ma vie était toute tracée…et puis je rencontre par accident, à la coloc, ce petit français, Florent !
Et vlan, me voilà submergé de sentiments et de sensations inconnus, le cœur me bat, l’appétit et le sommeil me manque, je m’affole, me crois malade. MAIS NON !... Non, juste un tsunami…
Je le guette, je l’espère, je l’attends et me désespère…
Tout est remis en question !
J’oublie Peggy qui s’inquiète et déprime chez moi, là-bas aux États-Unis ; je commence à abandonner mes recherches, je déserte ma vie d’avant pour ne penser qu’aux yeux noisette de Florent. Je ne suis plus qu’une outre vide en dehors de sa présence, une outre angoissée, aux milles soucis et toute fripée.
Tout efforts pour me remettre sur les rails de ma vie précédente sont vains, inutiles et seul me guide mon amoureuse ardeur, mon désir de tendresse et d’amour.
Ce godelureau, lui seulement, peut me laisser, en sa présence, le cœur tranquille.

Alain Galet (2019)

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L’écharpe rouge.
Ou la vie mouvementée d’une miniature.


Je suis une écharpe rouge éclatante, moelleuse, mousseuse et douce. J’appartiens à un grand conservateur de musée et pend souvent à son cou.
Pourtant, un jour, alors que mon propriétaire faisait, avant que le public n’y accède, le tour du grand musée qu’il dirigeait, je glissais de son cou et chut sur le sol sans que celui-ci s’en aperçoive, engagé dans un dialogue intense avec les œuvres accrochées au mur du musée.
C’était juste avant l’ouverture.
Une demi-heure plus tard, un visiteur au pas pressé et pesant, entra dans la salle et me vit. Il me ramassa, sans dessein, pour se précipiter vers une vitrine ou il se planta devant. Ses mains palpaient la laine de cachemire rouge feu pendant que s’engageait, entre lui et une miniature de femme, un dialogue intense. Soudain les mains s’arrêtèrent, il inclina son visage et me regarda incrédule. Prestement, après avoir lancé un regard à la cantonade, il sortit un curieux instrument et ouvrit la vitrine, se saisit du petit cadre et m’enroula dedans.
Je sentais les veines de tout son corps battre la chamade contre moi. Il tourna les talons, se précipita vers la sortie. Au factionnaire qui gardais l’issue, pour cacher son forfait, il déclara : « M. Berg a perdu son écharpe, je vais lui remettre… ! ». L’homme opina du chef et laissa passer notre voleur sans exiger de fouiller à l’intérieur de la boule formée par l’écharpe et la miniature.
Pourtant aujourd’hui, j’accueille de nouveau la miniature au beau petit cadre doré. Cette petite peinture représente une des plus belles maitresses de Baudelaire. Je dois la cacher et la dissimuler car mon maitre a réussi à la retrouver après une longue enquête. Il me serre, portant sa délicate marchandise dans ses bras fermement croisés. Car celui qui avait dérobé cette petite pièce, plus célèbre par la beauté de la femme représentée et par le relation de celle-ci avec le poète que par le talent de l’obscur peintre qui la réalisa, courre et poursuit mon maitre comme si celui-ci lui avait arraché son enfant. Notre voleur, un homme d’une soixantaine d’années, obsessionnel et maniaque, fut excusé par mon maitre afin de lui éviter des poursuites judiciaires. Mais perdre l’objet de sa vénération n’était, pour lui, pas une chose simple.
Je fus froissée, secouée, nouée et presque étouffée. Mais au final, on m’ouvrit pour déposer mon précieux fardeau sur le velours cramoisi de la vitrine d’exposition. On me défroissa et on me déroula délicatement pour que je puisse ouvrir mon cœur doux et soyeux afin de libérer la miniature qui y avait trouvé refuge. Deux gants blancs prirent délicatement le petit cadre doré qui sertissait l’image pour le remettre en place l’image si désirée et moi je revins m’enrouler autour du cou de mon propriétaire. Celui-ci une fois l’écharpe nouée, fit quelques pas en arrière pour juger de « l’accrochage » ; ce qui me permit de voir enfin, en bonne lumière, le visage de cette belle inconnue au si aimable sourire et qui semblait me remercier.

______________________________________________________________________________________________________________________________________Retiens la nuit !

Olivier rêvassait, allongé dans la pénombre de sa chambre d’enfant dans cette maison qui respirait la nostalgie.
« Retiens la nuit, la vie ne suffit pas à oublier le passé, les jours heureux passés en famille, dans la chaleur et la douceur »
Mais on, pensa-t-il, il est temps d’aimer vivre, un amour pour rien, comme ça, pour la vision des coquelicots dans les champs de blés, le gout anisé des rouleaux de réglisse.
La caresse ronronnante d’un gros matou, la nuque gracile d’une jeune fille placé devant dans un bus, l’air frais et piquant de l’altitude à l’arrivée d’une grande randonnée…Oui, il fallait laisser tomber sa vanité, oublier son ego et les attentes disproportionnées et vivre, respirer, aimer, jouir et s’émouvoir… Il s’endormit, serein, le nez dans son vieux nounours avec odeur poivrée si particulière.


Alain Galet (2018)